lundi 14 avril 2025

TESTE POUR VOUS : WANKO SOBA DE HIRAIZUMI

Nous continuons notre périple dans le Tohoku, la région japonaise située au nord-est de l'île principale de Honshu, et nous sommes aujourd'hui dans la ville d'Hiraizumi (平泉町), préfecture d'Iwate.

Une fois de plus, le repas a été choisi de manière à nous faire découvrir une spécialité régionale et ce midi ce sera le wanko soba. Les soba sont des nouilles à base de farine de sarrasin qui peuvent se manger froides ou chaudes.

Et la particularité ici, c'est la manière de les manger. On reçoit d'un côté plusieurs plateaux avec des petits bols de nouilles correspondant à une bouchée et de l'autre côté un ensemble de "toppings", c'est-à-dire des sauces, condiments et autres garnitures à utiliser à sa guise.




La table devient donc très vite impressionnante au vu du nombre de bols ! A ma gauche, vous voyez qu'on reçoit à la base deux plateaux empilés (par personne) de petits bols de nouilles soba mais on pourra en avoir tant qu'on a faim vu que c'est à volonté. Face à moi, le plateau des toppings préside à la destinée de mon repas : on attrape avec ses baguettes une portion de soba (un petit bol complet donc) qu'on transfère dans le bol principal du plateau des toppings au fond duquel attend déjà une délicieuse sauce (dont la réserve se trouve dans le récipient à bec verseur sur la droite). Là, on assaisonne sa bouchée comme on le désire, on reprend avec les baguettes les nouilles maintenant prêtes afin de les déguster... et on recommence avec le contenu du petit bol suivant, jusqu'à satiété. Tout simplement délicieux !

UNE JOURNEE DANS LA BAIE DE MATSUSHIMA

C’est dimanche alors grand luxe : départ à 8h30. Comme chaque matin depuis que nous sommes dans le Tohoku, Francis nous parle du poète Matsuo Basho (1644-1694) - qui a lui-même parcouru la région quelques siècles avant nous - et nous lit des extraits de ses écrits. A chaque fois concernant la ville qu'on va visiter dans la foulée. J'apprécie cette originale préface aux visites, mêlant anecdotes et littérature.

La Sente étroite du Bout-du-Monde est une œuvre majeure de Basho. Elle se présente sous la forme d’un carnet de voyage composé aussi bien de haïkus (qui ne portaient à l'époque pas encore ce nom) que de prose, et raconte son périple de six mois dans le Tohoku. 

Sur Matsushima (松島 = littéralement l'île aux pins), il écrit : "Ces îles sont-elles nées d’un caprice du dieu des Montagnes au temps du Chaos primordial ? Une chose est certaine : ni le pinceau du peintre ni celui du poète ne peuvent rendre justice à cette merveille de la Création." Avec la grisaille ambiante et la pluie qui menace, il va nous être difficile de corroborer ses dires. Mais vu que ce moutonnement de petites îles couvertes de pins a été désigné l'un des trois plus beaux paysages du Japon, aux côtés d'Amanohashidate (du côté de Kyoto) et Itsukushima (du côté d'Hiroshima), on va lui faire confiance. Si ça vous intéresse, sur l'île de Miyajima située juste en face d'Hiroshima, vous pouvez lire mon article de 2014 intitulé Miyajima : ses daims, son torii, ses huîtres.


On aborde la baie de Matsushima par un arrêt au parc Saigyo Modoshi no Matsu qui offre un très bon point d’observation, sublimé ici par les cerisiers en fleurs. L'occasion d'une photo de groupe.





On se rapproche ensuite du bord de l'eau et on emprunte un petit pont rouge pour aller voir le temple Godaido, l'un des symboles de la ville (que l'on retrouve d'ailleurs sur le tampon du Centre d'information touristique), ainsi que le pavillon de thé Kanrantei aménagé au 16e siècle et "d’où l’on voit les ondulations de l’eau". 





Bon là ce que l'on voit surtout c'est que, si on ne presse pas le pas, on va louper notre balade en bateau dans la baie au milieu de toutes ces petites îles couvertes de pins. 

A leur sujet, il faut que je vous raconte une chose incroyable que Francis nous a expliquée ce matin : si la ville de Matsushima a été relativement épargnée par le tsunami de 2011, c'est que les nombreux îlots disséminés dans la baie (voir la carte infra) ont joué un rôle de brise-lames et cassé la puissance de la vague qui déferlait. Fascinante nature !







C'est bien connu, l'air du large ça creuse et arrive alors à point le délicieux dîner composé notamment d'un Yosenabe (Japanese Hot Pot), un bouillon où l'on fait cuire ses ingrédients. 


Mon choix de glace : un half / half avec le sésame noir (qui se fait rare)
se mariant bien avec l'acidité de la framboise

La vue depuis le lieu du repas (ça se couvre encore plus !)

Il pleut davantage lorsque nous sortons du restaurant et c'est en mode imperméables et parapluies que nous abordons la visite du temple Entsuin, un autre des trésors du clan des Date (sur ce clan, voir mon article précédent). Le site est constitué du Sankeiden (mausolée de Date Mitsumune qui montre des traces de contacts existants avec l'Europe dans ses peintures de fleurs ou encore de symboles venus de nos cartes à jouer) datant de 1646 et surtout d'un jardin zen qui figure entre autres la baie en réduction. Outre le rock garden, on y trouve un jardin de roses (mais ce n'est pas la saison) et d'autres beaux petits coins à découvrir sur mes clichés ci-dessous.





Le beau tronc est celui d'un Lagerstroemia indica, 
communément appelé Lilas d'Inde

Et les fleurs blanches, c'est du Lysichiton

Direction enfin le temple Zuiganji dont certaines parties sont considérées comme trésor national et qui possède de très belles peintures sur fusuma (écran opaque coulissant, utilisé pour définir les espaces ou servir de porte dans l'habitat traditionnel japonais). Comme souvent, pas de photos à l'intérieur des temples. Mais voici des clichés de l'extérieur et notamment des deux vieux prunus, l'un blanc et l'autre rose, qui auraient été plantés au 17e siècle.






Pour terminer cette visite de Matsushima, je vous invite à consulter cette page ou cette autre page pour découvrir des estampes de la baie réalisées au fil des siècles mais aussi pour lire l'anecdote qui voudrait que Basho (mais ce n'est pas prouvé), resté sans voix devant la beauté des lieux, aurait écrit ce haiku qui fait beaucoup rire les locaux quand ils nous entendent le réciter :
Matsushima ya
aa Matsushima ya
Matsushima ya