Nikko (日光) est le seul site historique du programme de 2025 que j'avais déjà visité précédemment mais c'était en 2011 donc ça remonte un peu. Et je l'avais vu dans la grisaille si j'en crois ce blog donc j'avais l'espoir d'une autre perspective sous le soleil... espoir un peu douché (c'est le cas de le dire !) quand j'ai vu la météo annoncée pour ce vendredi. J'avais d'ailleurs envisagé dans un premier temps d'intituler ce papier "Nikko sera gris ou ne sera pas" !
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J'avais hâte / besoin d'être dépaysée |
Départ plutôt matinal annoncé (7h30 dans le hall de l'hôtel) : ça ne me pose pas de problème si je peux profiter du petit déjeuner. Le buffet ouvre à 6h30 donc ça me laisse le temps de me composer une belle assiette variée.
Nous prenons ensuite la route pour une excursion d'une journée à Nikko, petite ville d'environ 80.000 habitants située à 150 kilomètres au nord de Tokyo, dans la préfecture de Tochigi. Je suis contente d'y retourner car, dans mon souvenir, c'était en pleine nature. Et, effectivement, la centaine de bâtiments qui composent le site se trouvent disséminés au milieu d'une forêt de cryptomerias, cèdres, pins, etc. C'est qu'en fait on entre dans le Parc National de Nikko pour accéder à l'ensembles des principaux temples et sanctuaires classés au patrimoine mondial de l’humanité par l'UNESCO en 1999.
On commence par une des parties du temple Rinno-ji (Sanbutsudo) et plus précisément sa "salle des 3 bouddhas" : Amida Nyorai (au centre), Senju Kannon (à droite ; déesse de la miséricorde, dont chacune des mille mains tient un outil pour aider l'humanité à atteindre l'illumination) et Bato Kannon (à gauche ; bouddha à tête de cheval, représentant la force / le pouvoir). Comme souvent, les photos sont interdites à l'intérieur ; j'en ai déniché sur le net pour vous donner un aperçu, surtout de l'incroyable Bato Kannon avec la tête de cheval qui surgit dans sa chevelure.
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Sanbutsudo, de profil |
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Sanbutsudo, de face
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Les 3 statues en bois recouvertes d'or et de couleurs Source image : Holiday Travel |
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Restauration de Bato Kannon, bouddha à tête de cheval Source image : "Religion in Japan", Université de Vienne |
J'étais jeune en 2011 lors de ma première visite et je n'avais pas le souvenir de tant de volées d'escaliers. Pourtant il va y en avoir une série ! C'est que, dans un tel site, ça monte par pallier - et pas en ligne droite - jusqu’au "saint des saints", souvent une pagode. Ici le point le plus haut n'est pas la pagode mais les cendres de Tokugawa Ieyasu, fondateur de la dynastie des shoguns Tokugawa qui unifia l’archipel sous son autorité à l’époque Edo. C'est à son esprit qu'est dédié le sanctuaire shintoïste
Toshogu, créé au 17e siècle.
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Torii, lanterne et pagode au coeur de la nature japonaise |
Parfaitement intégrés dans leur environnement, tous ces sites sacrés comportent plusieurs bâtiments de tailles diverses qui constituent un ensemble patrimonial incomparable. Loin de la sobriété japonaise traditionnelle, les décors de bois sculptés polychromes forment un foisonnement baroque d’une rare intensité et fourmillent de détails à repérer. Si je me souvenais bien des
trois singes de la sagesse et de l'éléphant sorti de l'imagination d'artistes japonais qui n'en avaient jamais vus, Francis attire notre attention sur d'autres curiosités comme le chat qui pique un somme et le pilier monté à l'envers car rien ne doit être parfait.
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Les 3 singes de la sagesse sculptés sur les écuries |
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On l'a trompé énormément l'artisan au sujet de l'image de l'éléphant |
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Alors vous l'avez trouvé... |
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... le pilier qui est différent des 3 autres ? |
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Le "sleeping cat" |
Il y a beaucoup à voir à Nikko et on ne fait que longer le sanctuaire Futarasan pour terminer notre matinée par l'autre partie du temple Rinno-ji (Taiyuin), mausolée du 3e shogun Tokugawa, Iemitsu (le petit-fils d'Ieyasu). Ici aussi se mêlent des structures tant bouddhistes que shintoïstes et nous n'aurons pas le temps de tout voir. Il faut dire qu'on a aussi été bluffés par la beauté de la nature et notamment des Edgeworthia chrysantha, arbustes à la floraison jaune qui ont guidé nos pas vers cette dernière visite avant le repas.
On retrouve partout cette "triple rose trémière" (qu'on dirait composée de trois coeurs), emblème du clan Tokugawa. Mais bon, trêve d'histoire, de botanique et de culture : place à la gastronomie ! Dois-je vous préciser que j'avais faim après toutes ces réjouissances de l'esprit ?

Dans les petits plats qui composent notre repas, l'agence japonaise avec laquelle travaille Marco Polo veille toujours à ce qu'on puisse goûter l'une ou l'autre spécialité régionale. Ici c'est le Nikko yuba, une sorte de crème de tofu faite de la couche qui se forme au-dessus du lait de soja quand on le fait bouillir lors de la préparation du tofu. La légende dit que le yuba aurait été découvert par hasard par un moine qui avait perdu de vue son lait de soja chaud et qui goûta la fine peau qui s’y était formée. Aujourd'hui le yuba frais ou séché entre dans la réalisation de nombreux plats dont deux exemples sont repris sur notre plateau. Bon, je n'étais pas à la base fan de tofu et cette dégustation n'a rien arrangé à l'affaire mais c'était intéressant de goûter. Et, pas d'inquiétude, d'autres mets du menu varié ont fait mon bonheur. Y a qu'à voir ma tête réjouie.
Et ce sympathique repas fut aussi l'occasion pour Francis Peeters et Guy Vandesande d'offrir à Emiko - leur indispensable accompagnatrice locale depuis plusieurs décennies - leur dernier livre Jardins secrets du Japon dans lequel elle a découvert avec émotion que l'ouvrage lui était dédié. Un beau moment touchant.