dimanche 13 avril 2025

LE JARDIN DU RINNOJI : UN HAVRE DE PAIX LIE AUX SAMOURAIS DE SENDAI

Nous sommes de retour à Sendai, ville incontournablement liée au clan des Date (j'y reviendrai infra). C'est dans un temple lié à leur famille que nous nous arrêtons pour profiter du soleil revenu. D'autant plus qu'après la foule au festival des cerisiers en fleurs, il est vraiment très agréable de se retrouver quasi seuls au calme de son jardin.








Ce temple, le Rinnoji (輪王寺), a été fondé à l'origine à Yanagawa, dans la préfecture voisine de Fukushima. Je vous passe les détails historiques mais en résumé il a changé de localisation au fil des siècles pour prendre sa situation actuelle au nord du centre-ville de Sendai (préfecture de Miyagi) en 1602. 

Il n'est pas nécessaire que je vous raconte ici un roman (si si, je peux me taire parfois). Il me semble que les lieux parlent d'eux-mêmes et je vais plutôt vous emmener à travers mes photos dans une balade au fil des sentiers de ce jardin zen...



J'ai l'impression de voir le logo de Batman
(ok, j'avais dit que je me taisais)










Les cerisiers... On y revient toujours ces derniers temps. Au clan des Date aussi, d'ailleurs. Le plus emblématique de la famille fut Date Masamune (1567 - 1636). Devenu un seigneur puissant après une enfance pas facile (il perd l'usage d'un oeil à cause d'une maladie et sa mère - le trouvant alors incapable de devenir chef de clan - tente de l'empoisonner pour favoriser son frère), il a fondé un port de commerce important ayant permis à la région de prospérer. Il est aussi connu pour avoir été très pro-étrangers. Probablement pour des raisons d'opportunisme, mais ça en fait néanmoins un personnage original pour l'époque. Il s’est notamment lié avec des jésuites européens et l’Espagne. Il a affrété un bateau pour aller à Rome demander au Pape l’autorisation de commercer avec le Mexique. Cette entreprise fit finalement naufrage et son équipage et lui s’échouèrent… à Saint-Tropez, pas courant pour un samouraï ! 

Homme cruel et directif mais également mécène d’art, celui que l'on surnomme parfois "le dragon borgne" a tellement marqué l'histoire du Japon qu'il est encore connu et représenté à l'heure actuelle, entre autres dans l'univers des jeux vidéos. Son kabuto (casque traditionnel de l'armure japonaise qui - pour l'anecdote - aurait inspiré le design de celui de Dark Vador dans l'univers Star Wars) orné d'une énorme demi-lune asymétrique est très facilement identifiable.

Estampe contemporaine représentant Date Masamune, signée Kimochi, 
un artiste aimant mêler culture pop et images du monde flottant 

Nos visites du jour à Sendai se terminent par Zuihoden, le luxueux mausolée du clan Date dont le bâtiment principal au coeur du sanctuaire est classé trésor national. A noter que la ville de Sendai compte peu de bâtiments très anciens pour deux raisons principales : son éclosion date du 17e siècle (sous la famille Date donc) et elle fut fortement bombardée durant la 2e guerre mondiale. Le site actuel est dès lors une réplique à l'identique réalisée en 1979 sur base de ce qui avait été détruit en 1945.




Vestiges du bâtiment détruit pendant la guerre
et ayant servi de modèle pour la reconstruction



AU COEUR DU FESTIVAL DES CERISIERS EN FLEURS DU TOHOKU

Le hanami (花見 = littéralement "regarder les fleurs") est la coutume traditionnelle japonaise de célébrer la beauté éphémère des fleurs, principalement les fleurs de cerisier (sakura). C'est vraiment une activité très prisée des Japonais qui s'installent en famille ou entre amis sur des bâches au pied des arbres pour passer du bon temps et apprécier le retour du printemps. C'est peut-être d'ailleurs pour ce dernier aspect que ça m'a rappelé les traditions carnavalesques chez nous en Belgique. Surtout qu'à certains endroits sont organisés de véritables festivals avec de la musique, des stands de boissons et nourriture, et avec des illuminations ajoutées spécifiquement sur les cerisiers dès que la nuit tombe.


Les calendriers de floraisons sont scrupuleusement analysés en fonction de la météo et les perturbations climatiques récentes n'aident pas les prévisions. Il existe même une application pour téléphone (Navi Sakura) qui est mise à jour quotidiennement pour que chacun puisse connaître l'actualité du front de floraison des cerisiers de ville en ville.


Et aujourd'hui, nous aussi on participe aux festivités locales. A peine arrivés à Sendai, on embarque dans un car qui se lance sur la Tohoku Expressway en direction de l'Ogawara Sakura Festival. En fait, les cerisiers en fleurs sont le symbole de deux villes contiguës (Ogawara et Shibata) reliées par une large ligne d'environ 1.200 cerisiers le long de la rivière Shiroishi dominée par le Mont Zao. A l'heure où ils fleurissent se tient un festival très couru (au point que les cours d'école doivent servir de parking le week-end) : Hitome Senbon Sakura 🌸

Notre aventure commence par ce qui ressemble à un trafic illicite sur une aire déserte... mais c'est en fait Emiko qui récupère le bento (lunch box) et le thé que l'on reçoit pour participer pleinement au pique-nique sous les cerisiers. Il y avait un plan de repli (pas idiot quand on voit la couleur du ciel) dans un restaurant mais la météo ne viendra finalement pas gâcher la fête.

Opération bento : transfert des lunch box vers la soute de notre car

Comme dans chaque ville et évènement japonais,
des mascottes guident les visiteurs

Le car se trouve une place près de la gare
d'où arrivent plein de festivaliers en "Sakura train"

Des cerisiers en fleurs jusque sur les plaques d'égoût

Vite une photo avec le bento...

... puis on se pose...

... et on déguste !

Une fois rassasiés, on se balade pour prendre des clichés et pour s'imprégner de l'ambiance. Il est à noter que le cerisier en fleurs en ce moment est celui à 5 pétales (Somei yoshino sakura), une variété qui varie du blanc au rose.






Je n'aime pas trop la foule mais je me rapproche ensuite des endroits qui fourmillent plus de monde car je suis curieuse de voir ce que vendent les stands et d'observer les Japonais profiter du moment.





Au bout d'un moment, le bain de foule a assez duré. On reprend la route vers Sendai pour la visite suivante qui s'avèrera bien plus calme et ensoleillée. A suivre... (lire Le Rinnoji : un havre de paix lié aux samouraïs de Sendai)

En fin de journée, après avoir pris possession de nos chambres à Sendai, nous ressortons de l’hôtel vers 18h00 afin de prendre une marche d'une vingtaine de minutes qui doit nous conduire au soleil couchant au Tsutsujigaoka Park. Là d'autres festivités attendent les Japonais au milieu des cerisiers en fleurs, cette fois mis en beauté par des illuminations ciblées et des lanternes.