Départ à 8h30 : nous quittons Iwate. Emiko nous apprend que, dans le nom du logement "Shizukuishi Prince Hotel", il y a "shizu" = rain drop, goutte d'eau. Avec un peu de chance, on va s'éloigner de la pluie...
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Les détails intéressants se trouvent partout, de l'architecture au jardin |
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On voit bien qu'il reste de la neige dans la montagne |
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Cliché pris au vol sur la route |
J’avais déjà visité des habitations de samouraïs à Kanazawa et de commerçants à Takayama mais c'est toujours une expérience incroyable de pouvoir ainsi remonter le temps et pénétrer des maisons anciennes conservées pour des raisons historiques.
La petite ville médiévale de Kakunodate (角館町 ; moins de 15.000 habitants) dans la préfecture d'Akita est célèbre pour son ancien quartier de samouraïs qui préserve encore une dizaine de maisons intactes (il y en avait environ 200) et ses floraisons de cerisiers pleureurs dont les pousses seraient originaires de Kyoto. Pour les extraordinaires paysages parsemés de fleurs, on repassera vu que la fraîcheur du printemps a retardé le calendrier, mais pour les maisons qui ont marqué l'Histoire, c'est le bon jour. On visitera les deux plus intéressantes selon Marco Polo.
On commence par la maison Ishiguroke où vivent encore les derniers descendants de la famille qui nous guident ainsi au travers des pièces en attirant notre attention sur des détails de la construction et des anecdotes familiales.
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Emiko qui me cherche pour m'indiquer où se trouve le tampon souvenir |
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Au plus l'invité était prestigieux, au plus il avait le droit de prendre place sur le tatami le plus proche de l'alcôve (tokonoma) |
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La famille nous explique que la tortue est symbole de "longevity, happily and lucky" 🐢 |
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J'adore le jeu de lumière qui reproduit les tortues sur les murs |
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Vue sur le jardin |
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Archives familiales |
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Des planches anatomiques... |
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... et des livres de comptes |
C'est qu'on se trompe souvent dans l'image qu'on a du samouraï. Certes c'est un soldat à la solde d’un seigneur. Mais il ne fait pas que se battre, il a plusieurs fonctions. Celui-ci était aussi comptable de la ville et médecin... ma théorie personnelle étant qu'ils étudiaient l'anatomie pour mieux viser avec leur sabre.
Notre deuxième visite du jour à Kakunodate est pour Aoyagike, la plus grande des maisons de samouraïs conservées ici, composée de plusieurs pavillons, chacun centré sur une thématique et permettant de se replonger dans la vie quotidienne de l'époque. Et on s'attarde toujours bien sûr sur la porte, symbole de prestige social dans le Japon féodal.
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Un mode de transport original pour parcourir la ville |
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Après la majesté de la porte d’entrée, signe extérieur de richesse, le toit de chaume |
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Des oiseaux pour une fidèle lectrice qui se reconnaîtra |
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Quand on est des spécialistes des jardins comme Guy et Francis, on ne se refait pas : on analyse aussi les plantes environnantes |
Cet endroit se veut aussi pédagogique puisqu'on est invités à toucher, tester ou soulever certaines choses comme un katana (sabre japonais). La maison est par ailleurs liée à un personnage hors du commun : Odano Naotake. Né à Kakunodate et parent éloigné du clan Aoyagi, il est devenu célèbre pour ses illustrations du corps humain dans Kaitai Shinsho, la première traduction d'un livre d'anatomie néerlandais publié au Japon en 1774. C'était donc un samouraï mais aussi un artiste hors pair. Il fut le premier au Japon à utiliser les techniques de peinture occidentales du réalisme et de la perspective, apprises de Hiraga Gennai. Avec cette publication, il connut la renommée et plusieurs seigneurs féodaux férus d'art firent appel à lui pour des leçons. Il fut à l'origine du mouvement du 18e siècle appelé Akita ranga, une école influencée par la peinture à l'huile hollandaise.

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Toeizan Shinobazuike, Odano Naotake (1770), Akita Museum of Modern Art : avant plan plus oriental et arrière plan plus influencé par l’Europe |

Désolée pour les reflets sur les clichés qui suivent mais c'était juste pour illustrer une réflexion que je m'étais faite durant cette visite : on a souvent tendance à se représenter les samouraïs comme des personnages d'un temps ancien mais ils ne remontent pas à si longtemps puisque certains ont connu la photographie et ont été immortalisés seuls, avec leur clan, en famille ou encore lors de voyages diplomatiques. Parmi leurs nombreux métiers, les samouraïs étaient en effet des émissaires de leur seigneur et pouvaient dans ce cadre être envoyés à l'étranger à des fins diplomatiques. L'exposition de photos dit (merci la traduction avec le téléphone) que certains possédaient de nombreuses connaissances acquises grâce à leurs interactions avec les personnes âgées japonaises mais aussi avec les nations occidentales. Il y en a même qui parlaient couramment l'anglais et le français. Spéciale dédicace à Sébastien Polet pour les images de la mission en Egypte.
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J'espère que vous arrivez à lire les textes |
Au grenier, une autre expo que l'on n'attendait pas : "Les disques, hier et aujourd'hui". Au fil des évolutions de la diffusion musicale, de la naissance du phonographe d'Edison au CD en passant par le gramophone, les objets exposés parcourent les décennies jusqu'à l'introduction du disque horizontal. Et parmi les disques vinyles exposés, est-on vraiment étonnés d'en découvrir un d'Adamo (dédicacé, quand même !) ? Pas vraiment quand on s'intéresse comme mon paternel (à qui je fais un clin d'oeil) et moi à la chanson française et qu'on connaît le succès que notre compatriote a connu au Japon. La guitare en pangolin, elle, me laisse plus sans voix !
PS 1 : Si vous cherchez la sortie, souvenez-vous du moyen mnémotechnique que j'avais inventé lors de mon premier voyage au Japon, bien avant de faire de la calligraphie japonaise : cherchez "cactus carré" ! ;-)
PS 2 : Précédemment on construisait des châteaux dans des endroits dits imprenables dans la montagne mais c’était compliqué économiquement pour la ville qui gravitait autour. Après on s’est rendu compte qu’il valait mieux édifier un château bien situé pour les commerçants et l'entourer de plusieurs quartiers qui feraient tampon et protégeraient le seigneur local. Après le district des samouraïs, nous faisons donc un petit tour dans le district des commerçants car, devinez quoi : il pleut toujours ! La ville de Kakunodate est par exemple reconnue pour son très bel artisanat en écorce de cerisier.
Après un délicieux repas centré sur le poisson, nous visitons donc une de ces boutiques spécialisées, ainsi qu'une pâtisserie originale et un commerce très ancien (du milieu du 19e siècle) où certains font des réserves de sauce soja, miso (blanc) et autres condiments indispensables à la cuisine japonaise.
Enfin, nous reprenons le car pour 3h de route en direction de la côte pacifique où se niche notre hôtel de ce soir avec un onsen et des chambres traditionnelles (on va dormir sur futon donc)... et, qui sait, où se cache aussi peut-être le soleil. A suivre...